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1. La gauche politique sort renforcée de la guerre
1.5. L'implantation socialiste
La S.F.I.O. sort renforcée de la guerre grâce à la participation de ses militants à la Résistance et en premier lieu de son leader, l'ancien secrétaire fédéral Charles Lamarque-Cando, qui est chef adjoint départemental des Forces Françaises de l'Intérieur (FFI) et participe à la libération des Landes en août 1944. Conséquence directe de leur action clandestine, les socialistes détiennent des postes importants au sein des différents comités locaux de Libération et surtout au sein du Comité Départemental de Libération qui est présidé par Charles Lamarque-Cando. Maire et conseiller général de Sabres, ce dernier préside le Conseil général à la Libération. Il bénéficie alors d'une aura populaire dans tout le département, audience renforcée par sa maîtrise du gascon. Le recours à la langue locale est à la fois un atout en campagne électorale car il permet d'accroître l'impact des discours politiques notamment parmi les anciens, mais il est aussi, d'un point de vue symbolique, une marque identitaire d'appartenance au monde landais.
 Le prestige nouveau de la S.F.I.O. issu de la période de l'Occupation entraîne l'adhésion massive de nouveaux militants mais l'encadrement du parti est essentiellement assuré par d'anciens militants. A l'image de Charles Lamarque-Cando, le parti socialiste landais repose sur un corps militant issu de l'antifascisme des années 1930 : les luttes républicaines de l'entre-deux-guerres sont la base idéologique de la croissance de l'organisation socialiste qui devient cependant la première structure politique du département à la Libération. Après 1945, le socialisme consolide donc des réseaux qui se sont constitués à la veille de la guerre, et renforce sa forte implantation dans des communes auparavant conquises mais qu'il a perdues pendant la période de l'Occupation. Ce renforcement des effectifs militants de la S.F.I.O. est obtenu notamment grâce à Charles Lamarque-Cando qui remet sur pied la fédération du parti au terme des années 1940.
Avec Charles Lamarque-Cando, l'autre député socialiste landais de la Quatrième République est Marcel David. Originaire de la Marne et fils d'un instituteur, ce licencié de philosophie est nommé en 1940 censeur au lycée de Mont-de-Marsan. Il représente ces sympathisants socialistes qui deviennent militants à la faveur du nouveau contexte national : proche de la S.F.I.O., il n'a en effet pas d'activité politique avant la fin de la guerre. L'année de sa prise de fonction à Mont-de-Marsan, il milite cependant au sein d'un groupe local de résistance et, en 1941, s'affilie à Libération-Nord. A la Libération, il est nommé maire de Mont-de-Marsan puis son nouveau poste est confirmé lors des élections municipales de mai 1945 et il devient le représentant le canton au Conseil général. Cependant dès 1947 il perd la mairie de Mont-de-Marsan. La direction socialiste ne lui fait pas grief de ses échecs car sa position éligible sur la liste socialiste lors des élections législatives n'est pas remise en cause et il reste député jusqu'en 1958.
Outre Charles Lamarque-Cando et Marcel David, sur la liste S.F.I.O. pour l'élection à l'Assemblée constituante en octobre 1945 figurent également le vieux militant socialiste et résistant Camille Despujols, conseiller général du canton de Dax et graveur de profession, ainsi que André Darmenthé, cultivateur-résinier syndicaliste et conseiller général du canton de Castets. Pour le scrutin de juin 1951, les deux derniers colistiers sont remplacés par deux médecins, Camille Dussarthou (maire de Saint-Paul-les-Dax) et Louis Fournier (conseiller général et maire de du canton de Saint-Sever) ; ce dernier est cependant contesté par l'aile gauche de la fédération.
La composition sociale de cette dernière liste, avec la présence de deux médecins, illustre la sociologie particulière du parti socialiste : si, à la base, les membres des classes populaires sont nombreux parmi les adhérents, les notables socialistes (élus ou cadres du parti) sont souvent issus de milieux sociaux plus favorisés. Le contraste est important avec l'origine sociale des dirigeants du P.C.F. issus quasi-exclusivement du monde ouvrier et paysan. Néanmoins l'audience populaire de la S.F.I.O., mesurée par ses résultats électoraux, devance largement celle du P.C.F.. Après la période consensuelle de la Libération, les relations entre les deux formations concurrentes de gauche se détériorent en 1947 avec l'entrée dans la guerre froide et le retrait des ministres communistes du gouvernement dominé par les socialistes.
Contrairement à la virulence des discours tenus par les leaders socialistes landais du début du siècle, notamment en direction des métayers paysans et ouvriers résiniers, la propagande socialiste a perdu son caractère révolutionnaire. Le socialisme a remplacé le radicalisme dans la défense des " petits ", des fonctionnaires, des agriculteurs et a perdu son identité d'opposant au système capitaliste.
La fédération landaise de la S.F.I.O. appuie sa propagande sur un organe hebdomadaire, Le Travailleur landais, qui ne dépasse pas une diffusion de 2000 exemplaires. Le journal est seulement lu par les militants les plus actifs de la fédération et des sections locales car on compte environ 5 000 adhérents socialistes en 1950. La puissance organisationnelle de la S.F.I.O. se maintient malgré un déclin électoral lors des scrutins qui suivent la période euphorique de la Libération. Si l'audience législative de la S.F.I.O. reste toujours très forte, les socialistes perdent en effet des mandats locaux acquis dans l'immédiat après-guerre. Ainsi en 1949, 8 conseillers généraux sur 10 renouvelables ne sont-ils pas réélus, et la S.F.I.O. perd la tête de l'assemblée départementale.
Néanmoins la structuration des réseaux socialistes dans le département se poursuit. Au début de l'année 1953, des socialistes mettent ainsi sur pied une coopérative de construction, Les Castors Landais, à Mont-de-Marsan et Saint-Pierre-du-Mont. Impulsé par Charles Lamarque-Cando, cette coopérative est ouverte à tous les Landais désireux de devenir propriétaires et s'adresse particulièrement aux paysans, artisans et ouvriers fragiles économiquement. Dans un contexte de crise du logement, elle permet ainsi à des familles de condition modeste d'accéder à la propriété et, par son succès populaire, joue un rôle important dans l'urbanisation de Mont-de-Marsan.
A l'issue du congrès fédéral de la S.F.I.O. landaise du 9 octobre 1955, le secrétaire national du parti, Guy Mollet, inaugure la cité construite par les Castors Landais à Saint-Pierre-du-Mont. Répondant à une grave crise du logement tout en ne s'apparentant pas à des immeubles collectifs, ces lotissements sont appréciés car ils sont composés d'une maison individuelle entourée d'un jardin. Les castors landais équipent ainsi des milliers de familles non seulement à Mont-de-Marsan, mais aussi dans les autres communes landaises ainsi que dans les départements limitrophes, où se créent également, sur le même modèle, de nombreuses coopératives de construction.
Après des relations houleuses depuis 1947, la S.F.I.O. voit ses liens avec les communistes s'améliorer au cours des années 1950 grâce à une inflexion de la stratégie du P.C.F.. Les élus socialistes bénéficient ainsi du désistement communiste au second tour des élections, comme lors du scrutin cantonal d'avril 1955, ce qui assure un gain de 2 sièges au Conseil général pour la formation socialiste. Lors des élections législatives de 1956, l'équipe présentée par les socialistes est modifiée car le médecin Louis Fournier se retire de la liste au profit de René Folin, maire du village de Bénesse-Maremme et conseiller général du canton de Saint-Vincent-de-Tyrosse.
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