Le Front populaire
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Le Front populaire (1934-1939).


La période la plus marquante dans l'entre-deux-guerres, en tout cas celle qui marque le plus les esprits et la mémoire collective, est sans aucun doute celle qui s'étend de 1934 à 1939, des débuts du rapprochement entre les forces de gauche jusqu'à la rupture de leur union, alors qu'une nouvelle guerre mondiale devenait imminente. Oscillant entre menace fasciste et mobilisation sociale, entre euphorie populaire et crainte d'un conflit mondial, la France est frappée par de multiples secousses qui révèlent autant de crises profondes. Les Landes ne sont bien sûr pas épargnées et connaissent au cours de cette période une forte mobilisation paysanne.


Déclenchée par le fameux krach boursier d'octobre 1929, la crise économique mondiale se répand rapidement à l'ensemble du monde. Elle gagne la France avec un certain retard, puisque ce n'est qu'à partir de l'automne 1931 que ses effets se font sentir dans le pays, mais elle est tout aussi dramatique. Les industries les plus anciennes, comme le charbon, le fer, l'acier ou le textile, qui sont aussi les plus importantes dans la production nationale et par le nombre de leurs salariés, s'effondrent littéralement. Au total, la production industrielle baisse de 30 %.


Dans les Landes, les Forges de l'Adour, principal centre industriel du département, sont au cœur de cette tourmente touchant l'industrie française. L'agriculture n'est pas épargnée. Les trois principales productions françaises (le blé, le vin et la betterave) ne trouvent plus preneurs sur le marché international, car leur prix sont trop élevé. Les stocks s'accumulent rapidement, entraînant une chute des cours sur le marché intérieur. Les autres productions agricoles sont touchées avec la même ampleur. Les produits de l'élevage sont rapidement frappés par la crise : les consommateurs, dont les revenus chutent dramatiquement, réduisent leurs dépenses et n'achetent plus de viande ni de lait. L'effondrement de ces petites productions, qui assuraient les revenus d'appoint pour les petits paysans, porte souvent le coup fatal à tous ceux qui ne mettent en valeur que de petites exploitations. Dans le département, la production de lait a une grande importance pour les métayers, car ils en reçoivent l'intégralité et représente donc un revenu important, que ce soit par la vente aux industriels laitiers ou par la vente directe aux particuliers. Les métayers se mobilisent donc pour l'augmentation du prix du lait dans les syndicats. Plus généralement, c'est l'ensemble de l'activité résinière qui est touchée, puisque le cours de la gemme connait, depuis 1926, une baisse constante.


La crise économique se traduit dans l'ensemble de la société par une crise sociale et politique profonde. Les revenus et la situation sociale des classes moyennes urbaines et rurales se détériorent, ainsi que celle de la très grande majorité des salariés. Dans le monde rural, la crise sociale croit et va de pair avec un malaise profond, celui d'un mode de vie déjà sur le déclin. Depuis la Première Guerre mondiale, la population rurale ne cesse de diminuer. Le ressentiment à l'égard du monde urbain, de " la ville ", s'en trouve renforcé et, dans diverses régions, bon nombre de paysans se sentent exclus du champ politique national, dans lequel ils ne trouvent plus de représentants. Cette crise de la représentation tend à se généraliser à l'ensemble de la population, la période 1932-1934 étant marquée par une grave crise politique caractérisée par les blocages institutionnels, par la succession très rapide de gouvernements ne parvenant pas à s'imposer, et par une série de scandales politiques dont le plus célèbre reste l'affaire Stavisky, qui met en quelque sorte le feu aux poudres au début de l'année 1934.


L'association de la crise économique, sociale et politique sert en effet de terreau favorable à l'extrême droite française, regroupée dans une multitude de ligues telles que les Croix-de-Feu ou l'Action française. S'appuyant sur l'antiparlementarisme et mobilisant les victimes de la crise, ces organisations déploient leur activité dans toute une série de manifestations et d'actions violentes, série qui culmine avec la journée du 6 février 1934. Le monde paysan est lui aussi victime de ce phénomène par l'intermédiaire du mouvement des " Chemises vertes ", mené par Henry Dorgères. Ce dernier se veut le défenseur des paysans, victimes de la crise, le champion des petits contre les gros, contre la ville, contre l'État. Il tient meeting dans la région de Pau en 1935, mais son mouvement ne posséde pas d'appui dans les Landes où les petits paysans pauvres se tournent plus volontiers vers le Parti socialiste, voire vers le Parti communiste.


La manifestation des ligues d'extrême droite devant l'Assemblée nationale, le 6 février 1934, constitue un véritable électrochoc pour la gauche française, qui se mobilise le jour même pour organiser une contre-manifestation. Face à ce que beaucoup analysent comme une tentative de coup d'État fasciste, la réaction de la gauche fait naître ou renforce chez bon nombre de militants et de responsables socialistes, communistes et radicaux le désir d'union. Mais la méfiance est encore grande entre les diverses composantes de la gauche française. En mai 1934, les premiers rapprochements effectifs ont lieu, à la faveur du changement d'orientation générale du Parti communiste : s'adaptant aux virages de la politique soviétique et de l'Internationale communiste, le P.C.F. s'ouvre sur les socialistes et s'approprie désormais quelques-unes des grandes références patriotiques françaises. En juillet 1934, un pacte d'unité d'action est signé entre socialistes et communistes, et un an plus tard, le 14 juillet 1935, communistes, socialistes et radicaux défilent ensemble à Paris. Les trois plus grandes forces politiques de la gauche française se réunissent alors pour la première fois et créent dans la continuité de cette manifestation un Comité national du rassemblement populaire, auquel participent également la C.G.T. et la C.G.T.U.. Un accord de désistement entre les candidats des diverses composantes de ce mouvement est signé et une plate-forme commune est adoptée, sous le slogan " Le pain, la paix, la liberté ". En mars, l'unité est renforcée par la réunification syndicale, la C.G.T.U. rejoignant la C.G.T..


Grâce à l'accord de désistement de 1935, le Front populaire sort vainqueur des élections législatives d'avril-mai 1936 avec environ 380 élus. La nouvelle majorité de Front populaire qui siége à l'Assemblée nationale compte 149 députés socialistes (S.F.I.O.), 105 radicaux, 72 communistes et 51 divers gauche (U.S.R., dissidents communistes et indépendants). Lors de ces élections, les Landais envoient à la Chambre trois députés radicaux et un député socialiste, comme pour la précédente législature. À Mont-de-Marsan, le docteur Bezos (radical-socialiste) est réélu dans la première circonscription, tout comme Antoine Dubon (inscrit comme " U.S.R. et membre adhérent du Front populaire "), dans la deuxième. À la Chambre, ce dernier rejoint en 1937 le groupe S.F.I.O.. À Dax, Robert Lassalle (radical socialiste) est lui aussi réélu et à Saint-Sever, Pierre Fully remplace Pierre Deyris, qui ne se représente pas.


Immédiatement après la victoire du Front populaire, une immense vague de grèves se répand sur tout le pays, concernant plus de deux millions de salariés. Dans la plupart des cas, les grèves s'accompagnent de l'occupation des entreprises. Le département des Landes reste toutefois à l'écart de ce mouvement, puisque les travailleurs du seul véritable centre ouvrier du département, les Forges de l'Adour, ne font en grève qu'une journée, obtenant immédiatement la satisfaction de leurs revendications. Rapidement, Léon Blum recoit les représentants du patronat et de la C.G.T.. Le 7 juin 1936, sont signés les accords de Matignon, octroyant aux ouvriers des augmentations de salaire de 7 à 15 %, la reconnaissance du droit syndical dans l'entreprise et la pratique des conventions collectives. Mais les grèves ne cessent que progressivement, et le Parti communiste doit mettre tout son poids dans la balance pour que le travail reprenne massivement. L'euphorie populaire se prolonge tout l'été, notamment grâce à l'attribution des premiers congés payés. De façon générale, ouvriers et classes populaires ont le sentiment d'avoir enfin porté au gouvernement des dirigeants qui concentrent leur attention sur leurs préoccupations, leurs problèmes et leurs intérêts.


La situation extérieure et intérieure reste toutefois très trouble. Sur le plan international, la menace de guerre avec l'Allemagne nazie est au cœur des débats depuis l'élection, avec la nationalisation des entreprises d'armement puis régulièrement autour de la question du réarmement, dont Daladier, ministre de la Défense nationale, fait une priorité. Surtout, dès juillet 1936, le déclenchement de la guerre d'Espagne met le gouvernement Blum au pied du mur. Devant la défection du gouvernement britannique, Léon Blum renonce à une intervention en faveur des républicains espagnols, déchaînant ainsi la colère des responsables communistes. En décembre 1936, les communistes s'abstiennent lors d'un vote de confiance sur la politique extérieure. Le gouvernement se contente de fermer les yeux sur les départs massifs de volontaires français vers l'Espagne. À l'image d' Henri Dupin ou d' Albert André, tous deux originaires du département des Landes, environ 10 000 volontaires français rejoignent les Brigades internationales de l'armée républicaine espagnole.


Rapidement, la situation du gouvernement devient également précaire à l'intérieur du pays. Alors que l'extrême droite se déchaîne contre Léon Blum, sa politique économique montre ses premières limites : les milieux d'affaires sont profondément hostiles aux accords de Matignon, et ces derniers conduisent à la baisse de la production et, avec le poids du réarmement, à une augmentation des prix. À partir de l'automne 1936, le parti radical se montre de plus en plus réservé. Au printemps 1937, une série de manifestations importantes a lieu dans le sud de la France. Dans les Landes, les métayers gemmeurs lancent une grande grève au début de la campagne 1937. Ils tentent notamment d'obtenir l'application à leur profession des accords de Matignon et une revalorisation de leur statut et de leur revenu. À travers leurs revendications, les résiniers font la démonstration des limites de la politique économique du gouvernement Blum et, surtout, de la déception des attentes de diverses catégories de population. Les métayers-gemmeurs landais attendent ainsi en vain jusqu'en 1939 le vote de la loi, qu'ils appellent pourtant de leurs vœux depuis plusieurs dizaines d'années, modifiant le statut du métayage. En juin 1937, les radicaux rejoignent les députés de droite pour renverser le gouvernement, alors que Léon Blum demande au Parlement les pleins pouvoirs financiers.


Au printemps 1938, les successions de cabinets encore liés au Font populaire, conduisant à une nouvelle tentative de formation d'un gouvernement, échouent. Au cours des années 1938 et 1939, la France s'achemine lentement vers la guerre avec l'Allemagne, malgré la tentative désespérée des accords de Munich en septembre 1938. Et avec la guerre, une nouvelle période dramatique s'ouvre pour le pays.


 Plan de la quatrième partie 1934-1939  

1. Tableau social des Landes des "années 30"

2. La construction du Front populaire dans les Landes
3. Ouvriers et paysans landais en lutte
4. Mesures concrètes et espoirs déçus

 



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